Jour 5 - Luirojärvi par Tuiskukuru
Réveil à Vintilätunturi
Comme prévu, la nuit a été calme. Et une fois de plus, contrairement à mes habitudes en bivouac, j'ai réussi à bien dormir. Je ne trouve pas un sommeil très profond, mais il est suffisant et je le trouve exceptionnellement facilement. Mes nuits ne sont pas très longues car je me réveille tôt, mais cela me suffit. Le matin, le ciel devient lumineux très tôt, au moins avant 5h, même si le soleil ne se lève que deux heures plus tard. Et malgré mon bon équipement pour dormir, je finis toujours par avoir un peu froid. Ou plutôt frais. En tout cas, bien qu'imparfaites, ces nuits me suffisent largement et me reposent comme il faut. Dans des conditions de survie, l'organisme est capable de s'adapter et d'avoir besoin de moins de sommeil que d'habitude pendant quelques jours, sans que ses performances ne se dégradent.
J'envisage d'aller jusqu'à la cabane de Tuiskukuru, et éventuellement pousser jusqu'à Luirojärvi si je m'en sens capable et en ressens l'envie. Je suis un peu en retard sur ce que j'avais espéré, je pensais passer cette dernière nuit vers Tuiskukuru, mais ce n'est pas grave. J'ai plusieurs journées de marge. Je ne veux pas me presser.
Et en parlant de ne pas se presser, pour l'instant, c'est l'heure du petit déjeuner !
Comme chaque matin, le menu est le même : je sors mon bol, vide un sachet que j'ai préparé contenant la bonne dose de céréales et de lait en poudre. Je rajoute de l'eau par dessus et c'est parti ! Je complète ensuite avec éventuellement une barre de céréales ou pâte de fruits. En parallèle de ça, je me prépare un thé. C'est important de s'hydrater quand on le peut, car en journée, quand on est dehors en train d'avancer, ce n'est pas toujours évident de le faire.
J'en profite d'être à l'arrêt et en mode un peu confort pour tester mes chaussons de bivouac en duvet. Mon choix s'est porté sur le modèle Olan de la marque française Valandre. Bon ... je ne suis pas spécialement convaincu. Ça tient chaud juste ce qu'il faut, mais ce n'est pas dingue non plus. Disons que c'est mieux qu'être en chaussettes et que ça permet d'être plus léger qu'avec les grosses bottes lorsqu'on est sous la tente. Ce n'est vraiment pas essentiel. Mais maintenant que je les ai et vu le poids que ça fait, autant continuer de les emmener.
Comme la veille, plier le camp me prend un temps monstre. Il faut dire que je ne me presse pas trop vu que les conditions sont bonnes. Sous une tempête, je pense que je n'aurais pas eu le même rythme.
Juste après avoir fini de plier, quand j'étais en train de finir de remplir la pulka, un couple à skis est passé sur la trace juste à côté de moi. Des français ! Fanny et ... Sylvain. Je pense qu'il n'y a jamais eu une aussi grosse concentation de Sylvain au mètre carré dans ce coin de la Laponie. On discute un peu, on s'expose nos plans, on s'échange quelques coordonnées, puis on se donne rendez-vous à la cabane de Tuiskukuru. Ils repartent et moi je commence à mettre mes skis et à m'arnacher à la pulka.
Au moment de partir, d'autres personnes arrivent sur le chemin. Il s'agit d'un groupe de hollandais avec 5 ou 6 pulkas qui ont investi la cabane de Suomunruoktu la veille au moment où je partais. Ils me saluent et s'assurent que je vais bien étant donné que je suis tout seul. So far so good ! Ils sont tout contents de se servir de mon emplacement que j'avais bien tassé, pour s'arrêter faire une pause thé.
Je me mets enfin en route. Il est déjà tard. Monter et démonter le camp me prend trop de temps. C'est le gros problème. J'ai beau dire que je ne suis pas pressé, mais quand même.
Vers Tuiskukuru !
Déception ! Après une dizaine de minutes de marche seulement, je me suis rendu compte qu'il m'aurait suffit de pousser juste un tout petit peu plus loin la veille pour pouvoir poser la tente dans un paysage beaucoup plus ouvert. Dommage ! Mais pas bien grave.
Une fois la ligne d'arbre de la forêt passée, le chemin débouche sur le haut du tunturi (ces petites montagnes finlandaises). La végétation est beaucoup plus basse, généralement écrasée par le poids de la neige. La vue est bien plus dégagée. J'aime beaucoup ce genre de paysages. Même si à ce moment là, des nuages très bas m'empêchent de voir au loin, j'adore l'ambiance qui se dégage de ce genre d'endroit. J'ai comme l'impression de vivre dans un film en monochrome.
Tout est gelé, feutré, calme. Il y'a des empreintes d'animaux partout ! Certainement des lagopèdes pour la plupart. Mais je n'en vois pas.
J'ai essayé de faire décoller mon drone, mais il a refusé. La batterie était trop froide. J'ai donc dû la garder longtemps collée contre moi pour la réchauffer suffisamment.
Les hollandais ont fini par me repasser devant au moment où j'ai réussi à le faire voler.
Vers midi, lors de la traversée d'un long plateau, qui semble être une zone humide en été, j'ai été pris par une petite fringale. Mes jambes ont commencé à se couper tout doucement. C'est trop bête ! La cabane ne doit plus être très loin. Peut-être une demi-heure de marche, voire une heure. Il est temps de remettre un peu de jus dans le moteur. J'ai tapé dans mes barres énergétiques et dans mon sac de noix de cajou histoire de pouvoir tenir jusqu'à la cabane où je prendrai un vrai repas.
Peu de temps avant d'arriver à Tuiskukuru, le long plat se transforme en longue descente. Suffisament pentue pour que ça glisse tout seul, mais pas suffisament raide pour que ça devienne dangereux vu mon piètre niveau de skis. Il n'y a plus qu'à laisser aller !
J'arrive à peu près en même temps que les hollandais.
Sylvain et Fanny sont à l'intérieur en train de finir leur repas.
Vu comme je suis arrivé ici fatigué, je me dis que je vais rester là et ne pas continuer sur Luirojärvi. J'en parle avec eux. Ils me disent qu'ils pensent continuer. Il y'a une autre occupante dans la cabane et elle reste ici avec sa camarade car elle est malade. Elle n'arrête pas de tousser et n'a vraiment pas l'air en forme. Ils ne veulent donc pas prendre le risque de passer la nuit avec elle. Excellent argument !
Je me suis donc dépêché d'ingurgiter mon repas pour pouvoir faire le chemin avec eux. Pour ce midi, polenta avec viande séchée et barre de fruits en dessert. En entrée, toujours des bonnes vieilles graines ou fruits séchés.
À peine ai-je eu terminé, que nous nous sommes mis en route pour Luirojärvi.
Vers Luirojärvi !
Bon ... ils sont deux, ils ont l'air plus sportifs que moi, leur pulka est beaucoup plus légère que la mienne, ça va être dur de rester accroché à eux !
J'ai réussi à les tenir un petit moment, mais en fournissant un gros effort. Je me suis mis dans le rouge. Je transpire, l'énergie de mon repas fraichement pris ne se fait pas encore sentir dans mon corps. Je leur dis donc de partir devant et de continuer sans moi. Je les retrouverai à la cabane, ou alors je poserai la tente avant. Ils m'ont proposé de ralentir et de m'attendre, mais j'ai refusé. Je ne voulais pas devenir un boulet pour eux.
C'est pour ça aussi que je n'aime pas trop être en groupe. Seul, je vais à mon rythme et je me gère plus facilement.
La trace monte. Doucement, mais ça monte quand même, avec pas mal de petites bosses qui me demandent un petit effort à chaque fois. C'est assez épuisant. Puis, une fois le col passé, ça se met à redescendre. C'est à ce moment là vraissemblablement que mon repas a commencé à faire effet, car j'ai trouvé un second souffle. Les types de paysages se sont alternés. Forêt dense, puis paysage ouvert, puis forêt beaucoup plus ouvertes, avec des arbres blanchis par le gel. Ça avait un petit côté magique ! J'ai gardé le lieu en tête, car ça peut être pas mal pour poser la tente en cas de conditions favorables pour les aurores.
J'ai tellement trouvé un second souffle, que j'ai fini par les rattraper !
En revanche, beaucoup trop concentré sur mon avancée, chose que je voulais justement éviter, j'en ai complètement oublié de faire des photos. Vous ne verrez donc pas grand chose de cet après-midi.
Vers 17h, alors que le soleil va bientôt se coucher, j'arrive enfin au bord du lac de Luirojärvi.
Luirojärvi
Wow ! Je ne m'attendais pas à ça ! Les abords du refuge sont noirs de monde. Il y'a une énorme quantité de tentes qui sont plantées là. Beaucoup de monde à l'intérieur aussi, même s'il y'a plusieurs bâtiments. Visiblement, il y'a un groupe de 18 personnes qui sont là pour faire un stage d'apprentissage de l'itinérance hivernale. Je ne m'attendais pas vraiment à tomber sur une telle densité en arrivant ici. Ça ne m'enchante pas des masses, mais il est beaucoup trop tard pour que je me motive à continuer plus loin pour poser la tente. Je décide alors de dormir dans la cabane. Dans la pièce où je m'installe, il y'a les deux français, deux finnois et un couple de polonais.
Il fait super chaud ! C'est un vrai sauna là dedans. Avec cette chaleur, je me rends compte que mon sac de couchage est trempé à cause de l'humidité dégagée par mon corps. Bon ... eh bien je vais en profiter pour tout faire sécher hein !
Il n'y a plus de place sur les couchettes du bas. Je dors en haut, là où il fait le plus chaud. C'est insupportable, mais je n'ai pas trop le choix. Je me suis glissé dans mon drap de sac, avec le sac de couchage à côté, car la température risque de diminuer pendant la nuit. Les boules quies (indispensables !), et c'est parti pour une bonne nuit de repos bien méritée !
Ah ! Au fait ! J'ai finalement rattrapé mon retard. J'avais estimé trois jours pour arriver à Luirojärvi. On y est !
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