Jour 2 - Préparation à Longyearbyen
Réveil à 7H30 pour avoir le temps de prendre une douche et le petit déjeuner avant d'attaquer la journée. La nuit a été difficile, j'ai eu du mal à trouver le sommeil malgré la fatigue du trajet. Dehors, il fait déjà jour depuis bien longtemps. La vue est chouette avec la montagne derrière. Pas dingue non plus, mais c'est toujours bien mieux que la ville.
Ah oui j'oubliais : je n'ai pas sorti mon réflex ce jour là, donc pas de jolie photo. Seulement des clichés à la va-vite avec mon téléphone.
Ouiiii je sais, vous attendez surtout les photos, mais il va falloir patienter encore 🙂.
On prend donc le petit dej, il y a un peu de tout, du sucré, du salé. Je n'ai pas encore suffisamment faim pour m'attaquer au saucisson dès le matin, donc je reste au sucré.
Une fois terminé, les guides nous parlent des dangers du froid et comment lutter contre. On découvre l'effet "wind chill", ou "refroidissement éolien", qui fait le lien entre le vent et la température ressentie. Il existe un tableau qui permet d'évaluer cela selon la température ambiante et la force du vent. Vous pouvez le voir sur la page Wikipedia qui en parle. A l'heure actuelle, il fait -12°, ce qui donne -20° en ressenti.
Le mot d'ordre pour lutter contre le froid, c'est "pas de flemme dans l'Arctique" ! Comprenez par là : il ne faut pas rester inactif et tout le temps bouger.
Robin prend ensuite un air plus grave et nous annonce deux nouvelles. La première, c'est que la tempète annoncée pour la journée est confirmée. Nous ne partirons donc pas aujourd'hui. Il a déjà réussi à s'arranger avec la guesthouse pour que nous gardions nos chambres une nuit de plus. Aïe ! Déjà que le nombre de jours sur le terrain n'est pas énorme, mais ça nous en fait déjà un de moins. Cela dit, vu comme ça s'est gâté dehors et comme je n'ai pas fait une très bonne nuit, je suis relativement content de savoir que je dormirai au chaud cette nuit.
Le temps s'est bien transformé dehors. Voilà ce que ça donne :
La deuxième nouvelle, dont je ne comprends pas forcément l'importance des conséquences tout de suite, est qu'il y a une concentration inédite d'ours polaires à Tempelfjord, là où nous devons aller. Il y en aurait au moins six dont une femelle et ses deux jeunes près d'être en âge de la quitter, puis deux gros mâles qui attendent que ... la place se libère. Ça fait une forte concentration en testostérone, ce qui peut vite devenir explosif vu les bestioles.
Robin va donc réfléchir dans la journée à comment adapter le programme par rapport à ces éléments.
On passe maintenant aux explications sur le matériel. Pour nous donner une idée de ce qu'il faut embarquer, il nous montre ce qu'il a mis dans son propre sac.
Petit coup de stress, je me rends compte qu'une partie de mon équipement n'est pas adaptée. Ma grosse parka va faire double emploi avec la veste grand froid qu'ils vont nous prêter, sauf que je n'ai pas vraiment la couche intermédiaire qui va en dessous. En gros : un coupe vent et une petite doudoune. Il y a eu incompréhension quand je me suis renseigné. Par chance, Robin s'est souvenu qu'il leur restait de vieux coupes vent de guides dans leur stock. Je me promenerai donc avec un écusson "Guide Svalbard nature" sur le bras pendant le reste du séjour 😀
Nous retournons tous dans nos chambres pour préparer nos affaires. Un sac étanche dans lequel nous devons reconditionner nos vêtements nous a été prêté.
Ensuite, nous sommes allés préparer le repas tous ensemble dans la cuisine de la guesthouse. Puis nous avons profité de notre après-midi coincés à Longyearbyen pour aller se familiariser avec l'équipement histoire de ne pas perdre trop de temps sur le terrain quand nous partirons. Nous sommes donc allés près du stock de matériel, au milieu de rangées de conteneurs.
Sur le chemin, on tombe sur la camionnette de l'autre groupe qui s'est plantée dans le décor tellement la visibilité était mauvaise. Heureusement, plus de peur que de mal.
Les pulkas étaient déjà prêtes, nous en avons donc chacun pris une au pif. Dedans, nous avions :
- une tente
- un tapis de sol
- un matelas auto gonflant
- un sac de couchage (un gros machin de l'armée)
- une paire de raquettes
- une paire de bâtons
Ensuite, nous avions tous un peu de matériel commun. Par exemple moi j'ai hérité du réchaud et d'un sac de nourriture. D'autres avaient la vaisselle ou les piquets de tentes.
Nous nous sommes entrainés à nous arnacher puis à tirer ces grandes luges. Au final nos pulka faites maison avec Marion n'étaient pas si ridicules que ça, c'était assez ressemblant 😉
Après cela, nous avons déplié la tente mess pour voir comment l'installer. Ça ressemble grosso modo à un petit chapiteau. Robin nous explique que dessus il va falloir creuser une tranchée qui fait tout le tour pour que nous puissions nous assoir autour et que ça fasse une table au milieu. Puis nous avons continué en montant une tente dite "dodo".
Retour à la guesthouse. Apéro, préparation du repas. Pendant ce temps Robin passe des coups de fil à droite à gauche car il est toujours dans l'organisation du programme modifié de la semaine.
On fini de manger, puis l'annonce tombe. Le temps va s'améliorer demain dans la journée, mais le soir la tempête va revenir, au moins aussi forte. Il va donc falloir que nous allions mettre le camp relativement à l'abri avant que ça ne nous arrive dessus. De plus, Tempelfjord est vraiment trop dangereux à cause du trop grand nombre d'ours. Le guide ne veut pas prendre le risque d'y aller. Puis pour couronner le tout, le risque d'avalanche trop élevé dans certaines vallées fait que la chenillette ne veut pas nous déposer n'importe où, ce qui nous ferme des options. Je sens que ça commence à puer pour le programme.
Robin nous sort une carte sur la table pour nous montrer où nous irons.
Nous allons partir dans les montagnes. PAF ! Douche froide pour moi parce que je comprends très vite ce que ça implique. Montagnes ça veut dire qu'on évite la zone maritime où il y a de la vie et qu'on solde donc nos chances de voir ours, phoques, oiseaux, renards, falaises de glaciers bleues... Je m'étais préparé à l'idée que je ne verrai rien, mais pas à celle où on n'aura même pas essayé. Le séjour s'intitule "découverte de la banquise", mais au final, la banquise, nous ne la verrons même pas. A ce moment là j'avoue que je l'ai vraiment mauvaise. Je n'en veux pas à Robin, ce n'est pas de sa faute, il fait ce qu'il faut et il s'est donné du mal pour ça. C'est la faute à personne d'ailleurs. Juste un énorme manque de chance. On cumule les aléas. Je craignais de ne pas voir d'ours parce qu'il n'y en aurait pas. Mais en fait je n'en verrai pas parce qu'il y en a trop. Un comble !
Les autres ont l'air emballés par le programme, ou alors peut-être qu'ils cherchent juste à positiver. Sûrement aussi que nous ne sommes pas venus ici avec le même but. La plupart découvrent le grand nord. Moi j'y suis déjà allé deux fois. J'ai envie de voir des choses qui changent. Les montagnes ça ne me change pas tant que ça. J'en ai plein des magnifiques à une heure tout autour de chez moi. Alors ce ne sont pas les mêmes certes, mais tout de même !
Bref, pour finir la soirée, on enchaine sur un petit brefing à propos de la sécurité vis à vis des ours. Parce que oui, même si les probabilités d'en rencontrer dans les montagnes sont très faibles, le risque zéro n'existe pas, alors on ne va pas jouer avec ça. Les guides commencent par nous expliquer qu'ils auront chacun un fusil. Robin a un vieux Mauser qui date de la seconde guerre mondiale mais qui fait très bien le boulot. Erica a un model plus moderne et plus léger. Interdiction formelle pour nous d'y toucher. D'une pour éviter un accident, de deux car si on s'amuse à les déplacer, il faut que les guides sachent exactement où ils sont en cas d'urgence.
On passe ensuite à la partie qui nous concerne un peu plus : le pistolet d'alerte et les tours de garde. Comme j'en avais parlé, la nuit nous allons devoir faire des rondes à tour de rôle. Le but est plus dissuasif qu'autre chose. L'ours est curieux, mais méfiant. Sauf dans le cas où il serait affamé ou malade, il ne foncerait pas sur un camp où il verrait de l'activité. L'objectif de ces tours de garde sera donc de lui montrer notre présence pour qu'il reste à distance. Robin nous raconte que le guide de l'autre groupe, Quentin, était sur le terrain lors d'une des dernières attaques d'ours il y a quelques années. Il y avait plusieurs camps à Tempelfjord. L'ours s'est attaqué à celui des tchèques, le seul pour lequel il n'y avait pas de tours de garde d'organisés.
Concrètement, nous fonctionnerons par doublettes. Nous devrons faire deux heures par paires. Soit nous faisons une heure chacun en solo, soit deux heures à deux. La garde sera équipée d'une maglite (une grosse lampe torche comme les pompiers ou la police), mais aussi d'un pistolet d'alerte. Nous apprenons rapidement à le manipuler. Charger, armer, tirer, désarmer ...
Deux cartouches différentes sont fournies. La rouge balance une fusée éclairante. La grise un gros pétard. On nous prévient qu'il ne faut surtout par tirer en l'air, car avec le vent, c'est un coup à ce que ça nous revienne sur la tronche. Il faut aussi ne pas tirer trop loin, car si ça pète derrière l'ours, il pourrait prendre peur et charger droit devant lui. Le mieux est de tirer à mi chemin entre lui et nous.
Voilà ! On sait tout. Il ne reste plus qu'à aller au lit, faire une bonne nuit pour pouvoir attaquer pour de bon le lendemain. Nous avons l'impératif de devoir monter un camp béton avant l'arrivée de la tempête.
Au moment de me coucher, je cogite beaucoup. Je sais qu'il faut que j'arrive à positiver, mais j'ai vraiment du mal. Je suis super frustré. J'ai tant attendu ce voyage que je suis vraiment déçu de voir que la thématique de ce qu'on va faire va être complètement différente de ce qui était prévu. Que le programme change, ça ne me dérange pas. Mais là on n'est même plus dans le thème du tout quoi ! Et je ne verrai rien de ce pour quoi j'ai décidé de choisir ce séjour 😟 Je ne peux en vouloir à personne en plus. C'est la nature, c'est comme ça, point.
Enfin bon, même si je n'arrive pas à me réjouir, on va dire que j'arrive encore à peu près à court-circuiter les pensées négatives dans ma tête. L'ancien moi d'il y a quelques années aurait passé son temps à ruminer là dessus et à noircir le tableau. Mais maintenant j'arrive à me dire que dans tous les cas, on ne pourra rien y faire, c'est ainsi, alors il va falloir tout de même en profiter. La fatigue n'aidant pas, il est temps de mettre fin à cette journée. Demain est un autre jour.
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