Jour 4 : en route pour Sommaroy
Mercredi matin, je me lève tôt (pour une fois). Je réfléchis à ce que je vais pouvoir faire. Au début je voulais partir pour la journée à Sommarøy, un village sur la toute petite île de Sommarøya qui m'a été conseillé à de multiples reprises. Je voulais ensuite rester là bas pour attendre les aurores, parce que je me disais que j'aurai peut être plus de chance qu'ici au niveau de la météo.
Puis finalement, la journée entière ça m'a paru un peu trop pour un petit village. Alors le matin j'ai pris ma voiture et je suis parti faire la route côtière nord de l'île de Kvaloya. C'était un des endroits où je pouvais potentiellement voir des orques. Mais bon, je ne comptais pas trop là dessus, mon but était plutôt de voir du pays, surtout que j'avais entendu dire que c'était pas mal pour les randonnées raquettes par là bas.
Ma matinée ressemble à la journée d'avant : je roule 5 minutes, je m'arrête pour regarder et prendre une photo, puis je repars pour recommencer quelques kilomètres plus loin.
Les paysages sont magnifiques, il y a de grandes étendues neigeuses ponctuées par de petites montagnes. Je tombe sur des tipis samis (les autochtones de la Laponie) avec des traîneaux et des motoneiges. C'est sûrement plus là pour les touristes qu'autre chose, mais ça ajoute un petit truc à l'ambiance nordique.
Au bout de la route, j'arrive dans un petit village de pêcheurs où j'ai pu voir un truc très étrange. Une immense structure en bois, comme un tunnel en forme de triangle. Je savais que c'était pour faire sécher des choses, mais je ne savais pas exactement quoi. Je décide donc d'aller voir. Je fais un mètre et je m'enfonce dans la neige jusqu'en haut des cuisses. "Bon... Ok... Tu veux jouer à ça ?". Je retourne à la voiture pour chausser les raquettes et je m'y remets ;)
C'était bel et bien un séchoir... pour des immenses têtes de poissons. Aucune idée de ce qu'ils en font après mais je crois que je préfère ne pas savoir. Surtout si ça a un rapport avec la bouffe.
Sur le retour, le long de la route en passant dans un village, je vois de grosses boules blanches dans les arbres. Des piafs ! Des espèces de grosses perdrix qui font "piout piout". Il me semble qu'il s'agit de lagopèdes blancs. Je me dépêcher de remplacer mon grand angle par mon télé. "Il faut toujours être prêt pour l'action" qu'ils disaient dans mon livre sur la photo d'oiseau. "Gniagniagnia" c'est bon hein tu vas te calmer le livre ! Je vais pas passer mon temps à changer d'objectif.
Pour le coup je commence à regretter un tout petit peu de ne pas avoir pris mon 600mm, mais ça va, je m'en sors quand même. Les bestioles ne sont pas trop farouches.
Je rentre, je mange et je me prépare pour la suite de ma journée : Sommarøy. Le plan est donc d'y aller l'après midi, de faire un trajet auto/photo comme je commence à en avoir l'habitude, puis de rester là bas à attendre les aurores le soir. Je prends donc tout ce que j'ai plus chaud, prépare un thermos de thé et des sandwichs. C'est parti pour une heure de route (sans les arrêts) !
Après une vingtaine de minutes de trajet, j'arrive à un endroit où j'avais l'impression d'être sur une autre planète. Tout était blanc autour de moi. Le soleil perçait un peu à travers le nuages, du coup ça en était éblouissant. Le coin m'a paru pas mal aussi pour que je retourne y faire des raquettes un de ces jours.
En passant dans un petit village au fond d'un fjord, le soleil s'est enfin mis à donner des couleurs. Et ça change vraiment tout ! Je ne dis pas que c'est moche quand c'est tout gris hein. C'est juste que c'est une ambiance complètement différente.
Un peu avant d'arriver à Sommarøy, je vois un renfoncement avec une petite plage super jolie et qui a l'air facilement accessible, orientée plein nord avec une vue bien dégagée. Ça ressemble à un bon coin pour aller attendre les aurores ça !
Je chausse les raquettes et je vais voir. Je tombe sur un gars qui me dit qu'effectivement, si j'ai la chance de pouvoir en avoir une ici, le spot est parfait. Mais que je ferai mieux de continuer sur Sommarøy et monter sur une petite colline pour avoir une vue panoramique et augmenter mes chances. Ok, on verra ce soir comment ça se présente.
Je continue donc ma route et arrivé à Sommarøy. C'est super joli, mais le doute commence à s'installer par rapport à mon organisation de la journée. Il est environ 16h30... Qu'est ce que je vais bien pouvoir faire ici en attendant que la nuit tombe ? Surtout qu'il y a une tempête de neige toutes les 5 minutes. Bon pour commencer, je fais quelques photos. Puis quelques séquences de timelapse. J'attends qu'une tempête passe, puis je reprends.
L'heure tourne, mais pas assez vite. Je décide de reprendre la route et d'aller voir sur le côté sud de Kvaloya car Isac, un de mes hôtes, m'a dit qu'il avait un ami fermier là bas qui voyait tout le temps des aurores.
Je quitte Sommarøy, je passe le pont, j'arrive au niveau de la petite plage. Et là qu'est ce que je vois ? Trois énormes élans en plein milieu de la route ! Put*in la chance ! Tout le monde m'a dit que c'était très rare d'en voir et là je tombe sur un groupe de trois sans rien avoir demandé. Dans la précipitation je fais n'importe quoi, j'arrache le téléphone du tableau de bord pour me dépêcher de faire une "photo preuve", on ne voit rien. Je prends le réflex mais qui était monté avec le grand angle et réglé pour des poses longues "il faut toujours être prêt pour la photo d'ac..." <- mais ta gu*ule le livre, je t'ai pas sonné !
Je monte le télé, je dégaine, je shoote, mes photos sont dégueulasses, j'ai rien pris le temps de régler. Les élans commencent à prendre peur et partent dans le bois juste à côté. Je prends 10 secondes pour faire des réglages potables, je me rends compte que le stabilisateur est désactivé. J'ai dû le couper par erreur en sortant l'objo du sac. "Un bon photographe vérifie toujours son matér..." <- toi le bouquin, si tu l'ouvre encore une fois, je te mets au feu en rentrant !
Les bestioles ne sont pas bien loin, je les vois à travers les arbres, c'est ma dernière chance. Je me calme, j'ajuste le tir et paf :
Là je regrette quand même un peu plus de ne pas avoir pris mon 600mm. Mais bon, au niveau des sacs ça ne l'aurait pas fait alors tant pis.
Je continue ma route en étant comme un dingue dans ma tête parce que je venais de voir des élans en pleine nature. Quelques kilomètres plus loin j'ai vu des rennes, mais ils étaient vers des habitations alors je ne me suis pas arrêté. Et puis bon... Des rennes alors que tu viens de voir des élans... :D
J'arrive sur la côté sud. C'est joli, la vue est plutôt dégagée, mais le ciel est complètement couvert. J'en profite pour manger mon casse croûte. La nuit commence à tomber. Je décide de retourner vers Sommarøy, comme ça au pire en attendant les aurores, je ferai des photos de nuit du village en pose longue. Le ciel est chargé, je me reprends une grosse tempête de neige, l'appareil photo est bien trempé, je vois que la probabilité d'avoir des aurores s'approche de 0, ça commence à me saouler. Je me dis que quitte à faire un flop, autant le faire plus près de Tromsø. Je règle donc le GPS vers l'endroit où on en a vu avec Jennifer la première fois. C'est reparti pour une heure de route !
En chemin je vois quelques ouvertures dans le ciel, alors je m'arrête quand je peux pour jeter un œil et voir s'il n'y a pas un petit quelque chose, mais rien.
J'arrive à destination. Énormément de nuages. Ça me paraît mal barré, mais je m'en serai voulu de ne pas la faire cette chasse, alors je force un peu les choses et je décide de rester. Même si le ciel est blanc au dessus de moi, je regarde, au cas où. C'est blanc mais là y'a quand même un petit truc qui m'intrigue. Je sors l'appareil photo sur le trépied, pose longue : c'est vert ! Il y en a une qui était en train de danser au dessus de moi à travers les nuages. Elle était tellement puissante que même à travers le voile gris, j'arrivais à avoir du vert. Et voilà qu'arrive une nouvelle tempête de neige. Je me mets à l'abri dans la voiture en attendant que ça passe. Au bout de quelques dizaines de minutes, je remets le contact pour passer un coup d'essuie-glace. Rien à voir pour le moment, mais le ciel commence à s'ouvrir de l'autre côté. Je sors pour regarder et là tout d'un coup l'horizon s'embrase ! Je sors l'appareil et ça a été le début d'un grand festival.
En un rien de temps, le ciel s'est ouvert au dessus de moi et l'aurore à rempli tout l'espace. C'était fou, à croire que c'était synchronisé. J'ai shooté dans tous les sens, dès que je voyais que j'avais des réglages à peu près potables, j'enchaînais sur une séquence de timelapse.
Je sautais de partout en hurlant, j'entendais des gens qui faisaient pareil au loin. Ça n'avait rien à voir avec le premier soir. Là c'était pour de bon, j'avais le temps d'observer, d'en profiter, c'était magnifique. Pas d'histoire de "nuage" ou de "danseuse" comme j'avais cru le comprendre la première fois. C'est juste une question de transformation, d'intensité, de position. Ça bouge, ça vit, ça évolue. Tu as l'impression que l'horizon est en train de foutre le feu au ciel et tout d'un coup ça s'embrase, ce que tu voyais au loin disparaît pour te filer au dessus de la tête et partir de l'autre côté.
Bon par contre je le reconnais, même si c'est magnifique, il y a un petit point de déception : à l'œil nu, ce n'est pas vert ou violet, c'est du gris lumineux. Les couleurs n'apparaissent que sur les photos. C'est peut être parce que je les voyais par en dessous et que niveau matière c'est trop fin pour voir la couleur. Peut-être que quand on les voit au loin par le côté là couleur ressort plus.
Mais en tout cas, même sans ça, c'est absolument sublime. Par moment on croit que c'est lent et statique et puis d'un coup ça s'emballe et ça bouge dans tous les sens, on voit passer comme du courant électrique d'un bout à l'autre.
Tempête de neige ! On rentre !
Quelques dizaines de minutes plus tard, petit trou dans les nuages, je sors, j'attends un peu, ça recommence ! Le ciel s'ouvre d'un coup, tout s'illumine, synchronisation parfaite !
Ça a joué à ce petit jeu là 4 ou 5 fois de suite. Au bout d'un moment les nuages étaient trop denses, j'ai décidé de rentrer, j'en avais déjà pris plein les yeux.
Le point d'orgue de la soirée à été le moment où je me suis retrouvé avec un cercle parfait d'une aurore juste au dessus de ma tête. C'était magique ! Je me demande si le cercle n'était pas autour de l'étoile polaire d'ailleurs.
Aller, je vous mets une photo parce que je sais bien que c'est ce qui vous intéresse et que ce que je raconte vous vous en foutez un peu :D
Je n'en mets pas plus pour le moment car sur mon téléphone je ne me rends pas trop compte de la qualité. Du coup je ne voudrais pas trop en révéler pour le moment avant de les avoir traitées sur l'ordinateur.
Pour l'instant, même s'il y a quelques moments de flottement, surtout à cause de la météo, je reconnais que j'ai une chance de fou pour ce voyage. On est que jeudi matin, il me reste 4 jours et demi, je crois que j'ai déjà vu toutes les choses que j'avais envie de voir. Même celles que je n'espérais même pas sont venues toutes seules à moi. Je tiens donc à préciser, au cas où, que je n'espère pas du tout rencontrer une belle norvégienne :D
Bon aujourd'hui je vais lever un peu le pied. Je pense que je vais aller me balader dans Tromsø, dans les coins où je ne suis pas encore allé, notamment l'autre rive. Je vais peut être prendre le funiculaire pour monter sur la montagne en fin d'après-midi, manger là bas et faire quelques photos de la ville vue d'en haut. Et ce soir, si la météo le permet, je repars à la chasse !
PS : pour mes amis photographes, vous pouvez me dire ce que ça donne mes photos d'aurores sur grand écran ? Je ne me rends pas compte sur mon téléphone si je suis bon au niveau netteté, grain, exposition. Les histogrammes pètent un peu des plombs avec des photos comme ça.
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